Il faut réformer le droit d’auteur ! (partie 1 : les solutions)

Il faut réformer le droit d’auteur !

Partie 1: Les solutions

Avant-propos de l’éditeur-traducteur

Ce livre est un livre de remix. Il compile des argumentaires et revendications portés par différentes associations et collectifs français. Il n’est pas nécessaire de le lire dans l’ordre. Les plus pressés iront directement à l’index des mesures proposées situé en page . J’enjoins au lecteur d’essayer de découvrir les différents chapitres sans préjuger immédiatement de leur source originelle.

La croyance fondamentale qui guide les mesures proposées est que la libre circulation de l’information qu’Internet a facilitée devrait permettre un monde meilleur. C’est pourquoi le droit d’auteur dans sa forme actuelle est un frein au progrès. L’État doit abandonner une législation obsolète pour entrer avec fracas dans le nouveau millénaire. Ouverture et liberté doivent être les maîtres mots de la nouvelle société de l’information pour que nous en tirions le meilleur parti.

Ce discours a déjà été répété à l’envi par de multiples personnes. Parmi les parlementaires et l’exécutif français comme européen, le nombre de gens qu’il convainc ne cesse de croître. En même temps, les industries de l’ancien monde continuent de lutter âprement pour retarder leur chute et éviter de changer de modèle économique. Elles sont soutenues par quelques politiques et industriels qui n’ont pas grandi dans un monde où l’information veut être libre et ont peur des nouvelles libertés qui s’offrent à nous.

Pour ceux qui ne sont pas convaincus par les arguments développés dans ce livre, nous avons compilé en ligne un recueil1 de témoignages de personnages qui vise à mieux leur faire comprendre les enjeux de la nouvelle ère et à leur donner un avant-goût des bienfaits que ces libertés nous apporteront. Pour ceux qui doutent même de la pertinence de remettre en cause le droit d’auteur à l’heure actuelle, nous avons inclus une courte allégorie cycliste au tout début du livre.

Ces deux livres, le recueil de propositions et celui de témoignages, se veulent une bouteille à la mer : les lira qui voudra pour en tirer les enseignements qu’il voudra. Nous, internautes qui avons financé l’impression et l’envoi à nos députés du premier livre de mesures, nous enjoignons nos députés à lire les deux livres avec attention et à transformer nos propositions en lois.

Introduction

Le système du droit d’auteur est aujourd’hui déphasé. Il criminalise une génération entière dans une tentative désespérée d’arrêter le progrès technologique. Pourtant le partage de fichiers continue à s’accroître et les remix continuent à fleurir. Ni la propagande ni les techniques d’intimidation ni le durcissement des lois n’ont pu arrêter cette évolution.

Il n’est plus possible de renforcer les mesures de protection du droit d’auteur sans violer des droits humains fondamentaux. Tant que les individus pourront communiquer en privé, ils s’en serviront pour partager des contenus soumis au droit d’auteur. Le seul moyen de limiter le partage de fichiers c’est de supprimer le droit à la communication privée.

Nous voulons une société où la culture prospère, où les artistes et les créateurs ont une chance de vivre de leur art. Heureusement, il n’y a aucune contradiction entre le partage et la culture. Une décennie de partage intensif nous l’a prouvé. L’Histoire nous l’a prouvé.

Quand les bibliothèques publiques sont apparues en Europe il y a 150 ans, les éditeurs y étaient extrêmement opposés. Leurs arguments étaient les mêmes que ceux dont on se sert aujourd’hui dans le débat sur le partage. Si le peuple pouvait accéder gratuitement aux livres, les auteurs ne pourraient plus vivre de leur art. C’était la mort du livre.

Nous savons à présent que les arguments contre les bibliothèques publiques étaient faux. Les livres prêtés par les bibliothèques n’ont jamais fait s’écrouler les ventes des éditeurs et toute la société bénéficie de l’accès libre à la culture.

Internet est la plus merveilleuse bibliothèque publique jamais créée. Pour tous, y compris ceux aux moyens économiques limités, l’accès à toute la culture de l’humanité n’est plus qu’à un simple clic. Cette liberté de circulation de l’information est une révolution. L’État doit l’encourager en la protégeant et en participant lui-même à la production et à la diffusion de cette culture. C’est dans son intérêt comme dans celui de ses citoyens.

L’État doit accepter le progrès pour la diffusion de la connaissance qu’a apporté Internet. Il doit abandonner l’idée qu’interdire des pratiques majoritaires comme le partage à but non lucratif est porteur d’avenir. Dans une démocratie les lois sont d’abord ce que les citoyens en font. Il est absurde qu’un État démocratique lutte contre la majorité de ses citoyens.

Notre État doit aussi accompagner et encourager pour le bien de tous le progrès. Une vraie réforme du droit d’auteur n’est pas qu’une adaptation marginale de quelques restrictions obsolètes et dangereuses dans les lois actuelles sur le droit d’auteur. Elle implique l’ajout de nouvelles contraintes pour les administrations et les artistes en faveur de la diffusion du maximum d’informations possible.

Ces contraintes doivent lui permettre de co-créer avec ses citoyens les services dont ils ont besoin. Pour prendre les décisions les plus avisées et créer les œuvres les plus innovantes, ses citoyens ont besoin de données libres. Les données sont la matière première de l’économie de la connaissance. C’est pourquoi l’État doit fournir à ses citoyens autant d’informations et d’œuvres culturelles libres qu’il peut. Des mécanismes de gestion collective assainis peuvent permettre de favoriser ces nouvelles pratiques.

Les propositions que nous faisons sont résumées par les lignes directrices suivantes :

  1. Conserver l’essentiel des droits moraux et garder l’exclusivité commerciale pour permettre aux modèles économiques actuellement viables de le rester.
  2. Laisser s’épanouir la culture du remix et de l’échange à but non-lucratif.
  3. Diminuer la durée de protection.
  4. Enregistrer régulièrement les œuvres pour constituer un catalogue des métadonnées.
  5. Protéger et promouvoir le domaine public et l’accès libre à des œuvres et données libres.

Il reste aux politiques à s’emparer de ces idées pour les transformer en lois. Les plus pressés trouveront un index des réformes proposées en page .

L’allégorie du cycliste

 

Je me suis acheté un vélo. Un beau modèle. Je l’ai attendu longtemps.

Aux États-Unis, ça fait déjà longtemps qu’il est sur le marché. Pas en France. L’importer aurait été illégal. Le mois dernier, on pouvait le louer auprès d’une grande chaîne de télé pendant une semaine et faire une virée. Ça m’a plu.

Mais à la fin de la journée, il était de nouveau verrouillé. Je devais attendre.

Par la suite, le vélo est devenu disponible dans les arrières-cours de mon quartier pour pas un rond. Ça m’a paru un peu louche.

Mais je m’en fiche. Maintenant, j’ai mon vélo. Il est beau.

Il est marqué jusque sur les autocollants du cadre que je ne dois pas voler ou reconstituer de vélo. Logique. Pourquoi d’ailleurs ? Je l’ai bel et bien acheté.

Avant le premier démarrage j’ai dû appeler le fabricant et lui expliquer quels étaient les trois quartiers de la ville dans lesquels je voulais utiliser mon vélo. Lorsque je circule dans un quartier non autorisé les freins s’enclenchent tout seuls. Je n’ai rien à faire. Ça fait partie du service. Je peux alors appeler le fabricant et reconfigurer le vélo. Ainsi je circule dans toute la ville.

Si je voulais louer mon vélo, ça ne me serait pas permis. La selle envoie des petites décharges dans le corps et signifie son désaccord. C’est à la répartition des masses à l’arrière qu’elle reconnaît qui s’assoit sur le vélo. Si ce n’est pas moi, la sonnette carillonne. Du coup, je fais attention à mon régime. Sinon mon vélo ne me reconnaît plus.

Il y a peu j’ai voulu le repeindre. Je trouvais que le kaki faisait vieux jeu. En grande surface, on m’a ri au nez. Ça serait tout à fait illégal. Est-ce que j’avais demandé au fabricant ? Il aurait sûrement dû prévoir quelque chose pour la couleur.

La ville vient de construire de nouvelles pistes cyclables et je trouvais qu’elle avait raison. Mais j’ai entendu une rumeur : mon vélo ne peut plus rouler dessus. Les pneus sont trop minces. Ils ne passent plus sur le nouveau revêtement.

Mais une nouvelle génération arrive. Avec des chenilles. Ils seront beaucoup plus sûrs.

Maintenant il y a des postes de police sur les pistes. Pour contrôler qui est sur quel vélo. Quand on perd le contact visuel avec tous les postes, le vélo éjecte son passager. Par temps de brouillard, on voit souvent des hommes joncher la route comme des fruits trop mûrs.

Si on me vole mon vélo, ça peut devenir encore plus cher. Parce que je l’ai diffusé. Le constructeur ne peut plus en vendre un directement au voleur. J’en suis responsable.

Tout ça m’est devenu trop périlleux. Maintenant je veux donner mon vélo à d’autres. Mais on chuchote que ce ne serait pas permis. Mon vélo ne serait qu’à moi. Je l’ai donc simplement supprimé.

Conserver ce qui est utile du droit moral

 

Préservation du droit à la paternité
« Rendre à César ce qui est à César » est une maxime qui met tout le monde d’accord.

Dans les faits, les convenances sont souvent plus strictes sur le sujet que n’importe quelle législation relative au droit d’auteur.

Les scientifiques ou les blogueurs ont tendance à citer leurs sources d’une façon qui fait bien plus que respecter le minimum légal. Il y a plusieurs raisons à cela. Cela rend votre article plus crédible si vous donnez les liens vers vos sources afin que vos lecteurs puissent en vérifier l’origine s’ils le souhaitent. Les personnes que vous citez sont contentes, elles seront donc plus enclines à citer vos propres articles si l’occasion se présente et votre influence augmentera.

Le droit d’être reconnu en tant qu’auteur sur Internet n’est pas menacé. Nous proposons donc de laisser inchangé ce point de la législation du droit d’auteur. Nous proposons également de laisser inchangé le point suivant :

Préservation du droit à la divulgation
Le mode et le moment de la première diffusion ne peuvent être décidés que par les auteurs des œuvres. Une personne qui ne souhaite pas que sa création soit portée à la connaissance du public ne doit pas être contrainte à le faire.

Il est également important pour des raisons commerciales que l’auteur et les intermédiaires auxquels il peut éventuellement faire appel soient maîtres du calendrier de diffusion de son œuvre. C’est ce que vise à garantir le droit à la divulgation.

En revanche, pour permettre l’émergence d’un droit au remix à but non lucratif développé dans le chapitre remix, il faut permettre la modification et l’adaptation des œuvres pour ne permettre à l’auteur de ne porter plainte que lorsque les transformations non commerciales de ses œuvres nuisent à sa réputation. C’est ce que propose déjà la Convention de Berne :

Indépendamment des droits patrimoniaux d’auteur, et même après la cession des dits droits, l’auteur conserve le droit de revendiquer la paternité de l’œuvre et de s’opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de cette œuvre ou à toute autre atteinte à la même œuvre,préjudiciables à son honneur ou à sa réputation.

C’est à travers la jurisprudence que le droit moral est devenu en France aussi étendu qu’aujourd’hui,en consacrant un droit quasi absolu au respect de l’intégrité des œuvres au bénéfice de l’auteur, mais il n’en est pas ainsi dans les conventions internationales.

La directive européenne 2001/29 sur le droit d’auteur dans la solution pourrait être modifiée dans le sens de la Convention de Berne et le législateur français pourrait également intervenir en ajoutant un article L-210 au Code de la propriété intellectuelle :

Restriction du droit à l’intégrité de l’œuvre
L’auteur jouit du droit au respect de l’intégrité de son œuvre. Il peut s’opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de cette œuvre, dans la mesure où elles sont préjudiciables à son honneur ou à sa réputation.

Bannir les verrous numériques

 

Les MTP ou Mesures Techniques de Protection, plus connues sous le sigle anglais DRM pour Digital Rights Management, visent à restreindre les usages possibles des consommateurs d’œuvres «achetées» légalement et sur lesquelles ils devraient donc pouvoir exercer tous leurs droits.

Nous proposons deux mesures les concernant. La première n’est réalisable qu’à long terme et la deuxième peut être immédiatement débattue et votée par le Parlement.

Interdire les mesures de protection technique
Il devrait être systématiquement légal de passer outre les MTP et nous devrions bannir les MTP qui empêchent des usages légaux. Les grandes multinationales ne devraient pas avoir le droit d’écrire leurs propres lois d’utilisation des fichiers.

La législation doit bénéficier à la société tout entière, y compris les consommateurs. En même temps avoir le droit de faire quelque chose selon la loi n’a que peu de valeur en soi si vous n’avez pas les moyens pratiques de le faire.

Il n’y a aucun intérêt à ce que nos parlements introduisent une législation équilibrée et raisonnable sur le droit d’auteur si en même temps nous permettons aux multinationales d’écrire leurs propres lois et d’imposer leur respect par des moyens techniques.

Dans son livre Culture Libre, le professeur de droit Lawrence Lessig donne l’exemple d’un livre numérique publié par Adobe. Le livre était Alice au Pays des Merveilles. Il a été publié la première fois en 1865 et les droits patrimoniaux qui le protégeaient ont expiré depuis longtemps. Puisqu’il n’est plus protégé, chacun devrait pouvoir faire ce qu’il veut du texte de Lewis Carroll.

Mais un éditeur auquel il a acheté le texte a décidé de régler les verrous DRM de telle sorte qu’il ne pouvait pas en extraire une copie ni l’imprimer ni le louer et encore moins le donner à un ami. C’est une atteinte manifeste à l’intégrité du domaine public.

Les aveugles et malvoyants qui ont besoin de convertir les livres numériques dans des formats audio qui leurs soient accessibles sont souvent entravés par les verrous DRM. Un traité de l’OMPI a récemment consacré au plus haut niveau une exception en faveur des handicapés visuels pour l’accès aux livres protégés et la production d’œuvres adaptées. Cette exception ne pourra devenir effective que si les DRM n’en empêchent pas la mise en œuvre concrète.

Un autre exemple est le zonage régional sur les DVDs qui empêche de regarder des films légalement achetés s’ils sont achetés dans une autre zone que celle où a été acheté le lecteur.

Autorisation de contournement des verrous
Si des verrous existent, ils doivent pouvoir être légalement cassés s’ils empêchent la jouissance pleine et entière de l’œuvre et de ses usages légaux.

Les verrous DRM ont été juridiquement sanctuarisés par les traités de l’OMPI de 1996 et la directive européenne 2001/29. Toutes les marges de manœuvre doivent être exploitées au niveau européen pour assouplir les dispositions relatives aux DRM, notamment en créant un véritable droit à l’interopérabilité et en consacrant la possibilité de contourner les DRM pour bénéficier de toutes les exceptions au droit d’auteur.

Il existe déjà un régime de régulation des mesures techniques de protection dans la loi française même s’il est peu et difficilement appliqué pour des questions de lourdeur administrative. Une telle exception existe aussi aux États-Unis via une exemption au Digital Millenium Copyright Act qui permet de contourner les verrous sur des DVD pour produire des œuvres transformatives.

Préserver et promouvoir le domaine public

 

Le domaine public est un bien commun qui a besoin d’être défendu

Depuis des siècles, les bibliothèques, les archives et les musées ont été, partout en Europe, les gardiens de notre riche et diversifié patrimoine culturel. Qu’il s’agisse de sculpture, de peinture, de musique ou de littérature, ces institutions ont su préserver nos trésors de connaissance, de beauté et d’imagination et en donner l’accès au plus grand nombre.

La numérisation apporte un souffle nouveau aux œuvres du passé et les transforme non seulement en une source d’intérêt pour les utilisateurs individuels mais aussi en matériau précieux pour construire l’économie numérique de demain.

Nous sommes convaincus que la mission de rendre accessible en ligne notre patrimoine culturel et de le préserver pour les générations futures est avant tout du ressort des institutions publiques. Il est inconcevable d’abandonner cette responsabilité à un ou plusieurs acteurs privés, au risque de le(s) voir imposer une forme de contrôle. Mais cela ne signifie pas que les entreprises privées ne doivent pas s’impliquer en matière de numérisation : bien au contraire, nous considérons qu’elles ont un rôle et souhaitons qu’elles renforcent leurs investissements dans le cadre de partenariats équilibrés et rentables.

Or ces partenariats sont rarement équilibrés faute de politique nationale forte. Il est donc essentiel de consacrer le domaine public et de le protéger par la loi. On ne peut plus laisser une question aussi essentielle relever du ressort des seuls établissements culturels et des collectivités dont ils dépendent, qui sont souvent mal armés pour aborder la question et engagés dans des logiques de dégagement de ressources propres qui peuvent les pousser à marchandiser le domaine public. Le domaine public doit être le même pour tous les citoyens en France, car derrière cette notion, c’est la liberté fondamentale d’accès à la Culture et le droit de créer à partir des œuvres du passé qui sont en jeu. Le défendre impliquera donc la création de nouvelles peines pour atteinte à l’intégrité du domaine public.

Quatre mesures pour que rien ne puisse être soustrait au domaine public

Inscription d’une définition positive du domaine public dans la loi
Inscrire le domaine public dans la loi.Les créations appartiennent en principe au domaine public. Ce n’est que par exception, lorsqu’elles sont mises en forme de manière originale et tant que durent des droits patrimoniaux, qu’elles sont protégées par le droit d’auteur. Au terme du délai de validité du droit d’auteur, l’œuvre est réputée appartenir au domaine public et elle ne doit plus pouvoir en être soustraite.
Protection du domaine public numérisé
Les reproductions fidèles d’œuvres du domaine public doivent aussi appartenir au domaine public.

Ce point permet d’interdire les pratiques des très nombreux musées, bibliothèques et services d’archives qui estiment qu’ils bénéficient d’un droit d’auteur sur les reproductions numériques d’œuvres élevées dans le domaine public. Ce principe a déjà été consacré dans la jurisprudence aux États-Unis à l’occasion de la décision Bridgeman Art library v. Corel Corp pour les reproductions d’œuvres en deux dimensions. La mesure s’appliquera principalement aux œuvres numérisées ou intégrées à des bases de données.

Le domaine public n’appartient pas à l’État
Exclure que les œuvres du domaine public numérisées puissent être considérées comme des informations appartenant à des personnes morales de droit public.

Plusieurs institutions culturelles considèrent qu’en numérisant des œuvres du domaine public, elles produisent des données (des suites de 0 et de 1) relevant du champ d’application de la directive européenne sur la réutilisation des informations publiques (PSI) et des différentes lois l’ayant transposée dans les pays de l’Union européenne.

Cette interprétation a un effet redoutable, car la directive européenne, si elle n’autorise pas en principe les administrations à s’opposer à la réutilisation des informations, leur permet de la soumettre au paiement d’une redevance, notamment pour les usages commerciaux. La réglementation permet en définitive d’installer un système de domaine public payant. De plus, les institutions culturelles bénéficient d’un régime dérogatoire complexe, dit exception culturelle, qui leur donne une plus grande marge de manœuvre pour poser des restrictions à la réutilisation.

Ce dernier point a fait l’objet d’une modification dans la nouvelle mouture de la directive PSI adoptée en juin 2013 par le Parlement européen, mais ne nouveau texte ne prend toujours pas en compte la spécificité du domaine public numérisé. C’est pourquoi il importe d’indiquer que les œuvres numérisées appartenant au domaine public ne doivent pas être considérées comme des informations publiques.

Élévation volontaire dans le domaine public
Permettre aux auteurs de renoncer à tous leurs droits sur leurs œuvres pour enrichir le domaine public.

On devrait permettre aux auteurs qui le souhaitent de verser par anticipation leurs œuvres dans le domaine public. La renonciation inclurait les droits patrimoniaux comme moraux. Cela peut poser problème dans différentes législations européennes et particulièrement en France concernant le droit moral.Mais lorsque la renonciation au droit moral se fait par le biais d’une expression non ambiguë de la volonté de l’auteur, valable à l’égal de tous, et non d’une cession au profit d’un éditeur par exemple, elle ne devrait pas être empêchée.

Enfin les œuvres créées par les agents publics dans le cadre de leurs fonctions pourraient être versées automatiquement dans le domaine public, comme c’est le cas actuellement aux États-Unis pour les œuvres produites par les agents fédéraux.

Reconnaître et promouvoir les licences libres

 

La possibilité d’inscrire la définition d’une licence libre dans la loi

La définition des licences libres relève actuellement purement du droit contractuel puisque la loi ne définit pas ce qu’est une licence libre. Il n’est pas nécessaire pour l’État de définir lui-même ce que des associations comme l’Open Knowledge Foundation ont déjà défini collaborativement. Il est en revanche nécessaire que les services de l’État se réfèrent à une définition précise des licences libres, qui est la suivante :

Une œuvre est réputée libre lorsque sa licence confère à toute personne morale ou physique, en tout temps et en tout lieu, les quatre possibilités suivantes :

  • La possibilité d’utiliser l’œuvre, pour tous les usages ;
  • La possibilité d’étudier l’œuvre ;
  • La possibilité de redistribuer des copies de l’œuvre ;
  • La possibilité de modifier l’œuvre et de publier ses modifications.

Des exemples de licences libres qui peuvent être appliquées à des œuvres ou données sont les licences Creative Commons CC-BY ou CC-BY-SA, la licence Art Libre, les licences Cecill, la General Public Licence, la licence BSD ou encore les licences gouvernementales Open Data (Licence Ouverte en France, Open Government Licence au Royaume-Uni).

Pour les œuvres et données produites par les administrations publiques, une préférence devrait être accordée aux licences comportant une clause de partage à l’identique (Share Alike) si ces administrations désirent limiter les risques de réappropriation exclusive.

Libérer toutes les données et œuvres qui peuvent l’être

Nous proposons de rendre obligatoire la libération des données et des œuvres produites ou subventionnées par les services de l’État ou des collectivités locales. Par exemple, un logiciel développé sur commande de l’administration devrait être libre, tout comme des cartes, des travaux de recherche ou un catalogue des métadonnées des œuvres enregistrées. Le rôle des personnes publiques est de favoriser la diffusion de la connaissance et l’initiative individuelle, non de marchander cette connaissance déjà financée par les impôts des citoyens ou d’accorder des monopoles à des entreprises. C’est particulièrement le cas dans le domaine de la recherche scientifique et les travaux des chercheurs produits sur des fonds publics devraient faire l’objet d’une publication en libre accès sous licence libre.

Libération des œuvres subventionnées
Toutes les œuvres ou données immatérielles produites sur commande des personnes morales de droit public ou cofinancées par celles-ci doivent être publiées sous licence libre gratuitement ou pour un coût d’accès marginal. Ce passage sous licence libre devra aussi s’appliquer pour toutes les œuvres divulguées par les administrations. Les données confidentielles ou critiques pour la sécurité publique sont les seules à ne pas devoir être publiées.

L’État a tout intérêt à travailler en co-création avec ses citoyens plutôt que contre eux. Le service de l’État Étalab a déjà publié une licence libre aux termes définis ci-dessus, appelée simplement Licence ouverte. Cette licence pourrait être la licence standard des publications des bases de données crées par l’administration, sauf précisions spécifiques.

Les œuvres qui relèvent du code de la propriété intellectuelle pourront être placées sous des licences libres comme la Creative Commons Paternité ou Art libre par exemple. La Creative Commons Paternité, plus communément désignée CC-BY, n’impose comme condition à la réutilisation que la reconnaissance de la paternité, tandis que la licence Art libre exige en plus que les œuvres dérivées soient publiées sous la même licence.

La sécurité des citoyens comme limite

Si nous insistons sur la nécessité de publier le plus grand nombre de données possibles, c’est parce qu’il n’est pas possible à l’État de prévoir quelles données seront utiles ou non. Bien souvent, c’est justement en reliant plusieurs bases de données individuellement anodines que l’on extrait des informations utiles. L’État ne peut pragmatiquement pas imaginer tous les liens qui peuvent être faits avec les données publiées. De plus, imposer que toutes les données doivent être publiées interdit de publier des bases de données volontairement incomplètes et oblige à publier les données sources.

La révision de la directive européenne sur les informations publiques a étendu le droit à la réutilisation dont bénéficient les citoyens européens, mais elle ne va toujours pas jusqu’à imposer aux administrations une obligation de publier en ligne les données qu’elles produisent, ce qui limite fortement la dynamique de l’ouverture des données.

La seule limite à cette logique d’ouverture de l’État doit être la protection de la vie privée ou de la sécurité des citoyens. Dans le cas de base de données brutes il faut prendre en compte la possibilité d’identifier les citoyens même si les données sont anonymisées. Par exemple, si la publication de données médicales comporte toujours le code postal et la date de naissance exacte des patients et permet à des assureurs de retrouver facilement quels clients sont affectés par des maladies graves, alors cette publication doit être interdite en l’état. Le niveau de granularité de la base de données doit être augmenté de sorte que cibler les individus ne soit plus possible.

Libérer les travaux de recherche

La libération des œuvres et données produites par les services de l’État concernerait en particulier les chercheurs et instaurerait une obligation nationale de publication en accès libre des travaux scientifiques financés par le biais de l’argent public. Une telle obligation existe déjà au niveau européen dans le cadre du programme OpenAIRE par exemple et plusieurs États européens étudient en ce moment la possibilité de mettre en place des politiques de libre accès au niveau national.

A minima, l’obligation faite aux chercheurs produisant des travaux sur financement public devrait porter sur le versement de leurs articles dans des dépôts librement accessibles en ligne. Les chercheurs pourraient continuer à publier dans des revues commerciales, à la condition que les cessions de droits consenties aux éditeurs ne les empêchent pas de déposer par ailleurs leurs travaux en libre accès. Au-delà, il importe que les États soutiennent le développement de revues en accès libre, en leur assurant des moyens suffisants pour garantir leur pérennité sans avoir à reporter l’intégralité de leurs coûts sur les auteurs d’articles.

Des sites de dépôts en accès libre gérés par des universités ou des centres de recherche existent déjà en France, ainsi que des initiatives de revues en accès libre. Il est donc possible de s’appuyer sur l’existant pour poursuivre le mouvement.

Rendre accessibles les données libérées

Libérer les données n’est pas suffisant si celles-ci ne sont pas facilement accessibles parce que leur accès est onéreux, parce que le format de diffusion n’est pas utilisable informatiquement ou est non-standard et nécessite de payer des licences logicielles élevées pour être lu.

Conditions d’accessibilité des données libérées
Les données produites et publiées par l’administration sous licence libre doivent respecter les contraintes suivantes :

  • Entières : Les bases de données sont intégralement publiées.
  • Brutes : Leur format est directement utilisable par un ordinateur.
  • Documentées : Elles sont accompagnées de leurs métadonnées dans un format documenté.
  • Interopérables : La documentation du format de fichier est aisément accessible et complète.
  • Actuelles : Elles sont les plus récentes possibles.
  • Permanentes : Leurs adresses d’accès sont durables.
  • Gratuites ou peu coûteuses : Le coût d’accès est nul ou marginal.

Le moyen technique le plus simple de remplir ces contraintes est de mettre en place via Internet des portails de dépôt qui les recensent et les mettent à disposition via des protocoles standards comme ceux utilisés pour afficher les pages web. Plusieurs gouvernements en Europe ont lancé de tels portails de diffusion des informations, comme le site data.gouv.fr en France. Mais les ressources humaines, juridiques ou informatiques dont disposent ces portails doivent être renforcées pour améliorer la qualité de service.

Créer un droit à la transformation des œuvres

 

La législation très restrictive d’aujourd’hui est un obstacle majeur pour les créateurs qui veulent embrasser toutes les possibilités offertes par le numérique.

Valoriser les œuvres transformatives
Nous voulons que soient reconnus trois droits à la création:

  • Le droit de réutiliser toute œuvre dans une autre et de publier le résultat.
  • Le droit d’utiliser toute œuvre existante pour la modifier et de publier ces modifications.
  • Le droit d’utiliser lucrativement ces œuvres dérivées en échange d’un paiement équilibré aux auteurs originaux.

Le premier droit concerne par exemple la réutilisation d’une musique dans une vidéo amateur, le deuxième l’utilisation des images d’un film pour en faire une fausse bande-annonce et le troisième la vente de mashups sur iTunes.

Dans la création originelle classique, l’ancien disparaissait dans le nouveau. La culture du remix contemporaine se différencie en ce que l’ancien reste visible derrière le nouveau. Le remix est une nouvelle copie créative que l’on reconnaît comme telle. Dans cette mesure, puisque la copie créative fait partie du quotidien de nos interactions à travers toutes les couches sociales, la reconnaissance d’un droit au remix est une condition essentielle pour la liberté de création et d’expression de notre société.

Il faut protéger la culture du remix car elle nous fait passer d’une culture de la consommation passive à une culture de la création massive.

À l’heure actuelle les majors revendiquent la propriété sur des sons individuels et de très courts extraits. Si vous êtes un musicien hip-hop, attendez vous à payer des centaines de milliers d’euros par avance pour avoir le droit d’utiliser des samples si vous souhaitez toujours rendre votre musique accessible au public.

C’est clairement une restriction du droit de créer de nouvelles cultures. C’est aussi un frein à une juste rémunération des auteurs. Si un droit au remix était reconnu, les auteurs des œuvres remixées pourraient être rémunérés en touchant une partie des bénéfices que génèrent les remix en échange de leur renonciation à leur droit moral à l’intégrité de leurs œuvres. En revanche, il serait totalement illégitime de rémunérer l’usage transformatif des œuvres dans un cadre non-commercial, car celui-ci relève fondamentalement de la liberté d’expression.

Une telle réforme peut être conduite de plusieurs manières et notamment par le biais d’un élargissement de l’exception de citation. C’est ce que recommande le rapport Lescure en France. La Commission européenne avait auparavant proposé d’introduire une nouvelle exception dans son livre vert sur le droit d’auteur dans l’économie de la connaissance publié en 2008. Le Canada a de son côté introduit en 2012 une exception en faveur du remix.

La directive européenne de 2001 sur le droit d’auteur est suffisamment ouverte, s’agissant du droit de citation, pour s’appliquer aux usages transformatifs. En France les contours de l’exception sont encore beaucoup trop étroits pour s’appliquer aux mashups et au remix. C’est pourquoi l’article 122-5 du Code de la propriété intellectuelle pourrait être modifié de la manière suivante :

Étendre le droit de citation
Les analyses et citations concernant une oeuvre protégée au sens des articles L. 112-1 et L. 112-2 du présent Code, justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique, d’information, ou de création sans but lucratif de l’œuvre à laquelle elles sont incorporées et effectuées dans la mesure justifiée par le but poursuivi.

Nous précisons dans cette mesure qu’elle s’applique à toutes les sortes d’œuvres pour empêcher que la jurisprudence ne la restreigne aux textes comme c’est actuellement le cas en France.

Enregistrer les œuvres tous les cinq ans

 

Les œuvres orphelines constituent un vrai problème. Bien souvent il est difficile de localiser le propriétaire d’une œuvre ce qui empêche de recueillir l’autorisation requise pour son utilisation. Or il est légitime que la charge de la gestion des droits soit également répartie entre auteurs et utilisateurs. De plus la majorité des œuvres orphelines ont peu ou aucune valeur commerciale mais il est quand même impossible de les diffuser ou de les archiver sans risquer des poursuites. Une grande part de notre héritage culturel commun du 20siècle risque de se retrouver perdue avant qu’il ne soit légal de la sauver pour la postérité.

Création d’un registre des œuvres protégées
La protection du droit d’auteur doit être accordée automatiquement dès la publication comme aujourd’hui, mais si les auteurs veulent continuer à jouir de l’entièreté de leurs droits après les cinq premières années de publication, ils doivent se manifester régulièrement de sorte qu’ils soient facilement trouvables. Les œuvres qui ne sont plus enregistrées sont élevées dans le domaine public.

Les auteurs peuvent se réenregistrer n’importe quand après les délais échus pour récupérer l’entièreté de leurs droits. Il perdent cependant leurs droits sur toutes les œuvres dérivées des leurs pendant la période où ils n’étaient plus enregistrés.

Pour simplifier sa mise en œuvre, cette mesure peut ne s’appliquer qu’aux œuvres à venir et non aux œuvres déjà publiées.

Qu’est-ce qu’une œuvre orpheline ?

Une œuvre orpheline est une œuvre encore protégée par le droit d’auteur mais pour laquelle le détenteur des droits n’est pas connu ou ne peut être retrouvé. Cela peut être un livre, une chanson, un film, une photo ou toute autre création qui tombe sous le coup de la législation relative au droit d’auteur.

Les œuvres orphelines représentent un important problème pour quiconque souhaite les utiliser. Si vous le faites sans en avoir obtenu la permission, vous courez le risque que le détenteur des droits s’en souvienne soudainement, vous intente un procès et vous réclame beaucoup d’argent. Comme nous le savons tous, les tribunaux peuvent être assez enclins à attribuer des réparations même pour des violations mineures de droits d’auteur et à condamner à des sommes astronomiques. Dans la plupart des cas, le risque n’est tout simplement pas acceptable.

Puisqu’il n’y a pas de détenteur de droits à qui s’adresser pour demander une licence, vous ne pouvez rien faire. Peu importe combien vous trouvez important de partager cette œuvre avec le reste du monde, il n’y a aucun moyen de le faire sans enfreindre la loi et sans vous exposer à un grand risque financier. Les œuvres orphelines sont de fait bloquées par le droit d’auteur.

Le trou noir du vingtième siècle

Ce n’est pas un problème marginal. Une grande partie de notre héritage culturel commun du 20siècle tombe dans cette catégorie. Environ 75% des livres que Google souhaite numériser dans le cadre de leur « Google Books initiative » sont épuisés mais toujours protégés par des droits d’auteur. Dans cet ensemble, un nombre important d’ouvrages constituent des œuvres orphelines et le phénomène s’aggrave à mesure que l’on remonte dans le temps.

Même s’il est théoriquement possible de retrouver le détenteur des droits pour beaucoup de ces livres en entreprenant une investigation pour chaque cas individuel, cela devient en pratique infaisable lorsque vous voulez numériser en masse.

Google Books n’est pas le seul projet qui numérise des œuvres et les rend disponibles, même si c’est celui qui a attiré le plus d’attention. De nombreuses initiatives associatives ou institutionnelles existent comme Europeana, Internet Archive, le projet Gutenberg ou Wikisource. Tous ces projets sont freinés par le problème des œuvres orphelines.

Une directive européenne a été adoptée en 2012 au niveau de l’Union européenne, qui a introduit une nouvelle exception permettant aux bibliothèques, musées et archives d’utiliser certains types d’œuvres orphelines à la condition d’effectuer des recherches diligentes pour retrouver les titulaires de droits et prévoir une rémunération au cas où ils réapparaîtraient. Ce texte est difficile à mettre en œuvre en pratique.

C’est pourquoi le meilleur moyen d’éviter l’apparition des œuvres orphelines et de mieux répartir socialement les coûts liés à la gestion des droits consiste à prévoir un mécanisme d’enregistrement des œuvres.

Un registre bénéficierait à tous

L’existence de bases de données publiques, dans lesquelles les détenteurs des droits en questions peuvent facilement être retrouvés par tous ceux intéressés par l’obtention d’une licence commerciale d’une œuvre, sera bien évidemment bénéfique aux détenteurs de droits. Si vous voulez vendre quelque chose, rendre votre identité connue de potentiels acheteurs est bien sûr dans votre propre intérêt.

Inversement, cette base de données permettra de savoir quelles œuvres appartiennent au domaine public ou de connaître les licences sous lesquelles les auteurs veulent placer leurs œuvres. Elle permettra donc aux auteurs de savoir rapidement quelles sont les œuvres qu’ils peuvent réutiliser. Cela facilitera les processus de création.

Dans la dynamique de libération des données recommandée plus haut, cette base de données devrait être placée sous licence ouverte et facilement interrogeable via un portail sur Internet ou indexable par des moteurs de recherche externes.

De telles bases de données existent déjà partiellement pour les œuvres du domaine public, comme Europeana au niveau européen. Mais il s’agit de promouvoir, comme le fait le rapport Lescure en France, la mise en place de bases de données les plus complètes possibles, au niveau des États, et de connecter ces bases entre elles au niveau européen.

Une réponse conforme à la Convention de Berne

La Convention de Berne interdit de poser des conditions préalables à la jouissance du droit d’auteur, mais elle n’interdit de mettre en place des formalités ultérieurement, comme en attestent les licences collectives étendues dans les pays scandinaves. Un tel système est conforme à l’intérêt général et ne constitue pas non plus une exception au droit d’auteur.

Des dispositifs actuellement défavorables aux auteurs

Certains dispositifs comme celui mis en place en place pour la numérisation des livres indisponibles du 20siècle sont défavorables aux auteurs, car ils permettent en réalité aux éditeurs de conserver des droits sur des œuvres épuisées qui devraient normalement revenir pleinement aux auteurs. Par ailleurs, ce système ne conçoit que l’exploitation commerciale des œuvres, y compris les œuvres orphelines, pour lesquelles d’autres équilibres peuvent être trouvés.

Imposer systématiquement des conditions commerciales réduit l’usage de l’œuvre et le bénéfice en notoriété de l’auteur. On ne saurait autrement préjuger de la volonté des auteurs surtout en imposant des modalités de paiement a priori qui limitent les usages des œuvres orphelines alors que l’objectif même de la législation est précisément inverse.

C’est pourquoi permettre aux auteurs de récupérer leurs droits dès qu’ils se signalent rééquilibrerait la loi en faveur des auteurs tout en favorisant la réappropriation de leurs œuvres par le public.

Légalisation du partage non-marchand

 

Jusqu’il y a 20 ans, le droit d’auteur concernait à peine le commun des mortels. Les réglementations visaient les acteurs commerciaux, comme les labels, les chaînes de télévision ou les maisons d’édition.

Les citoyens qui voulaient copier un poème et l’envoyer à un de leur proche ou enregistrer une chanson sur une cassette et la donner à un ami n’avaient pas à s’inquiéter des poursuites judiciaires.

Mais le droit d’auteur n’a pas évolué depuis et impose de graves restrictions dans la vie quotidienne des individus. Alors que la technologie a rendu le partage de plus en plus simple, la législation protégeant le droit d’auteur a évolué dans le sens inverse, vers une criminalisation croissante de ce partage.

Dépénalisation du partage sans but lucratif
Nous voulons que le droit d’auteur redevienne ce pourquoi il a été conçu et rendre clair qu’il ne doit réguler que les échanges commerciaux. Publier un travail protégé sans but lucratif ne devrait jamais être interdit. La persistance du piratage d’œuvres protégées sans but lucratif est une bonne raison pour cette légalisation.

Contrairement à ce qu’affirment les représentants des industries culturelles, une telle réforme est possible, dans le cadre des traités internationaux tels que la Convention de Berne ou ceux de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle.

Le partage des oeuvres ne constitue pas un préjudice qui devrait faire l’objet d’une compensation au profit des titulaires de droits. L’usage d’une oeuvre ne la déprécie pas, mais au contraire augmente toujours sa valeur. De nouvelles pistes pour le financement de la création peuvent et doivent être explorées, notamment parce que le nombre des créateurs augmente considérablement à mesure que le numérique met en capacité de créer un plus grand nombre de citoyens. La légalisation du partage ne doit pas s’accompagner de systèmes de compensation à l’image de la copie privée.

Pour éviter tous risques de dérives, il convient au maximum d’éviter d’importer des notions liées au droit d’auteur dans la consécration des échanges non-marchands. Notamment il ne paraît pas opportun de recourir à de nouvelles exceptions ou à des systèmes de gestion collective obligatoire, qui impliqueront ensuite nécessairement une logique compensatoire de rémunération.

La solution la plus efficace pour légaliser les échanges non-marchands consiste sans doute à étendre la notion d’épuisement du droit d’auteur, déjà consacrée au niveau européen, en la rendant applicable dans l’environnement numérique, mais seulement aux échanges effectués sans but lucratif. Une telle réforme peut être opérée en révisant la directive 2001/29 sur le droit d’auteur dans la société de l’information.

Il faut s’adapter au sens de l’histoire

Une telle réforme est :

  • inéluctable

    On peut penser que ce serait une bonne chose si tous les échanges illégaux de fichiers disparaissaient. Mais ça ne change rien à la réalité.

    La limitation du partage de fichiers par les lois et la répression ne fonctionnent pas. Le partage de fichier est là pour durer, avec notre accord ou sans.

  • indispensable

    Les tentatives d’imposer l’interdiction du partage de fichiers mettent en danger les droits fondamentaux.

    Cela serait une solution inacceptable même si la répression fonctionnait ou si le secteur de la culture était réellement en train de mourir. Ni l’un ni l’autre ne sont vrais.

  • inoffensive

    Les artistes et le secteur de la culture se portent bien malgré le partage de fichiers (ou peut être grâce à lui), il n’y a donc pas de réel problème à résoudre.

  • facile à mettre en place

    La raison est très simple. « Suivre l’argent » suffit aux autorités pour leur permettre de garder une trace des activités commerciales.

    Si un entrepreneur souhaite gagner de l’argent, la première des choses qu’il doit faire, c’est faire connaître au plus grand nombre possible ce qu’il a à proposer. Mais s’il propose quelque chose d’illégal, cela arrivera aux oreilles de la police avant qu’il ait eu le temps d’attirer une clientèle importante.

    Aucune restriction supplémentaire des droits fondamentaux n’est nécessaire. Les systèmes de contrôle déjà en place pour d’autres raisons suffisent pour garder une trace des activités commerciales.

La différence entre le commercial et le non-commercial

La distinction entre la sphère des échanges non-marchands et la sphère marchande n’est pas facile à tracer, notamment sur Internet où interviennent de multiples intermédiaires lors des échanges (fournisseurs d’accès à Internet, plateformes de stockage ou de partage, moteurs de recherche).

Il existe déjà un arsenal juridique développé par les tribunaux, pour distinguer les entreprises à but lucratif de celles qui ne poursuivent pas de telles fins. Il existe aussi plusieurs licences basées sur le droit d’auteur, comme les licences Creative Commons Attribution Non Commerciale, qui s’appuient sur cette distinction.

Néanmoins, afin de garantir un maximum de sécurité juridique, il convient de définir de manière stricte la notion d’échange non-marchand en la restreignant aux formes de partage décentralisées entre individus, n’impliquant pas le recours à des plateformes centralisées de stockage des fichiers. Par ailleurs, le bénéfice de la légalisation des échanges non-marchands ne pourrait être invoqué que si aucun usage commercial des oeuvres n’est effectué, y compris des usages indirects de type recettes publicitaires.

En revanche, le fait de référencer et de signaler des liens vers des sites mettant à disposition des oeuvres doit rester libre. Cela permettra la mise en place d’annuaires de liens permettant l’accès aux oeuvres pour les internautes. Dans l’esprit de notre mesure, ces annuaires ne pourront être gérés que par des associations à but non lucratif qui ne dépendent pas d’une activité commerciale pour se financer.

De telles propositions favoriseraient des formes d’échanges décentralisés, utilisant l’architecture du réseau Internet en conformité avec sa nature et elles empêcheraient la reconstitution d’une industrie rentable du piratage comme Megaupload en avait donné l’exemple.

Tout comme actuellement, les entreprises ou associations qui proposeraient au téléchargement des fichiers protégés par le droit d’auteur et en généreraient un bénéfice substantiel resteraient obligées de reverser une partie de leurs bénéfices aux ayants-droits.

Une exception facilitant les usages pédagogiques et de recherche

Prescripteurs de culture, les enseignants jouent un rôle fondamental en matière de sensibilisation à la création culturelle et artistique. Avec leurs élèves, ils utilisent de plus en plus souvent des ordinateurs et Internet dans le cadre de leurs cours pour diffuser des œuvres protégées par le droit d’auteur. Cependant l’exception pédagogique actuelle repose sur des accords sectoriels complexes et prête à confusion. L’enchevêtrement de dispositions spécifiques conduit les enseignants à se situer aux marges du droit de la propriété littéraire et artistique.

Les chercheurs qui doivent fréquemment utiliser des oeuvres protégées dans le cadre de leurs travaux ont les mêmes soucis. Des usages innovants de recherche comme le datamining (fouille de bases de données) peuvent nécessiter d’utiliser à grande échelle des oeuvres protégées.

La complexité des règles, source de lourdeur bureaucratique et d’insécurité juridique, est d’autant moins compréhensible que les enjeux financiers en cause sont limités.

La dépénalisation du partage non-marchand aurait comme conséquence immédiate de permettre aux enseignants et professeurs de l’Éducation nationale et du monde de la recherche de pouvoir librement utiliser et diffuser des travaux protégés par le droit d’auteur à leurs élèves ou collègues. En revanche les entreprises d’enseignement privé sans contrat avec l’État ne seraient protégées que par l’exception pédagogique actuelle.

L’obligation que nous préconisons de placer sous licence libre et de publier les travaux des agents publics aurait aussi pour effet de favoriser le développement des ressources pédagogiques libres.

Une exception spécifique introduite au niveau européen et couvrant l’ensemble des usages d’oeuvres protégées effectués sans but commercial au sein des établissements d’enseignement et de recherche constituerait toutefois une garantie bien meilleure. S’agissant d’usages aussi légitimes que l’éducation et de la recherche, il importe que cette exception ne fasse pas l’objet d’une compensation financière. C’est déjà le cas au Canada depuis une réforme opérée en 2012 et cela devrait aussi l’être en Europe et en France.

Vingt ans de monopole commercial

 

L’industrie du divertissement est bâtie sur l’exclusivité commerciale des travaux protégés. Nous voulons sauvegarder cette activité. Mais les durées d’exclusivité actuelles sont absurdes. Aucun investisseur ne voudrait attendre un retour sur investissement aussi long.

Réduction de la durée de protection
Nous souhaitons raccourcir les durées de protection à quelque chose de raisonnable à la fois du point de vue de la société et des investisseurs et nous proposons vingt années à partir de la publication.

Nous souhaitons la même période de protection pour tous les types de création.

Une telle réforme n’est possible qu’en obtenant la révision de la Convention de Berne, qui a déterminé la durée minimale des droits comme étant celle de la vie de l’auteur plus 50 ans. Au niveau de l’Union européenne, la durée des droits a été harmonisée par la directive 2011/77, qui a porté la durée des droits à celle de la vie de l’auteur plus 70 ans. Obtenir le consensus politique nécessaire pour réviser ces textes sera un processus long et complexe, mais aucune réforme sérieuse du droit d’auteur ne peut mettre de côté la question de la durée excessive des droits.

À productions différentes, durées différentes ?

Ne serait-il pas judicieux d’avoir des durées de protection différentes pour les différents types de création ? Vingt années de protection pour un programme informatique ont certainement des implications différentes de vingt années pour un morceau de musique ou un film. Ne serait-il pas mieux d’adapter les durées de protection selon ce qui est raisonnable pour chaque type de création ?

Le chiffre sur lequel il faut se prononcer est arbitraire. Cela pourrait être quinze ans ou vingt-et-un ans ou dix-huit ans sans changer grand chose. C’est donc partiellement une affaire de sensibilité personnelle et chacun va vouloir une durée de protection longue pour le type de création qui est le plus proche de sa sensibilité personnelle. Devoir définir des valeurs semi-arbitraires pour chaque catégorie de production réduit donc les chances de trouver une solution que l’on peut défendre de façon objective.

Une durée rationnelle pour un investisseur

Si l’on regarde la question du point de vue d’un investisseur, les choses deviennent différentes. L’industrie de la musique a beau être très différente du secteur du logiciel, ils ont quelque chose en commun. L’argent c’est de l’argent, quel que soit le secteur dans lequel on choisit d’investir.

Lorsqu’un investisseur prend la décision d’investir dans un projet, quelle que soit l’industrie – cela peut être la musique, le cinéma, le logiciel grand public, ou tout autre chose – cet investisseur établira sa stratégie avec une limite de temps pour obtenir un retour sur investissement. Si le projet se développe selon les prévisions, il est supposé couvrir ses coûts et dégager des bénéfices dans les x années. Si tel n’est pas le cas, c’est un échec.

X est toujours petit dans ce genre de prévisions. Que quelqu’un établisse une stratégie de développement concernant un projet culturel dont le délai de retour sur investissement est supérieur à trois ans est hautement improbable. Les personnes qui construisent des ponts, des réacteurs nucléaires et autres infrastructures effectuent évidemment des investissements à plus long terme, mais en dehors de ces industries les stratégies de développement de plus de trois ans ne sont vraiment pas courantes.

C’est encore plus vrai dans le domaine de la culture. Qui peut prédire ce qui sera à la mode dans deux ou trois ans, dans un paysage aussi changeant que celui de la culture ? On attend de la plupart des projets culturels qu’ils génèrent des bénéfices dans l’année.

En considérant les durées de protection du point de vue d’un investisseur, on peut justifier le fait d’avoir les mêmes durées pour toutes les créations. Le but de l’exploitation exclusive du droit d’auteur est d’attirer les investisseurs vers le marché de la culture. Les investisseurs pensent la même chose sans tenir compte de ce dans quoi ils sont en train d’investir.

Un projet doit dégager des bénéfices dans l’année ou les suivantes, autrement c’est un échec. La faible probabilité que le projet que vous avez financé se révèle indémodable et continue de générer des profits pendant des décennies est une chance pour l’investisseur, mais ça n’a pas sa place dans un projet de développement sérieux.

Pourquoi pas moins ?

L’important c’est de se débarrasser des durées de protection actuelles d’une vie ou plus. Ces longues périodes sont clairement néfastes pour la société puisqu’elles gardent la plupart de notre héritage culturel commun bloqué même longtemps après que la majorité des productions aient perdu toute valeur commerciale pour les ayants-droits. C’est une perte sèche économiquement parlant et un scandale culturellement parlant.

Si les durées de protections étaient réduites à 20 ans, cela résoudrait la plupart des problèmes « du trou noir du 20siècle », et permettrait aux bibliothécaires et archivistes de commencer l’urgente tâche de préservation des créations du 20siècle qui se dégradent dans les archives, en les numérisant. Cinq ou dix ans seraient plus appropriés pour favoriser l’archivage, mais 20 ans devraient convenir.

Dans le même temps, 20 ans sont encore suffisants pour nourrir le rêve plaisant (mais hautement improbable) de créer un succès majeur indémodable qui génère des revenus durant des décennies. Si votre prochain projet trouve le bon filon et vous propulse soudainement sous les feux des projecteurs pour longtemps tel Paul Mc Cartney ou ABBA, 20 ans devraient être plus que suffisants pour que vous deveniez très riche et que vous n’ayez plus jamais jamais à vous soucier d’argent.

Remodeler le financement de la culture

 

Trois sources d’investissement principales

Les investissements privés, les subventions publiques et le mécénat individuel ou collectif sont les principales sources de financement de la culture.

Les investissements privés comme ceux opérés par les maisons d’édition ou les studios d’enregistrement doivent continuer. C’est pourquoi nous défendons au chapitre légalisation qu’il ne faut pas dépénaliser la diffusion à but lucratif. Il faut permettre aux modèles économiques existants de perdurer.

Le rôle des subventions publiques dans la création aujourd’hui est essentiel. L’État, les régions et les collectivités locales investissent dans la culture car ils considèrent qu’il est du ressort des institutions publiques de soutenir l’offre culturelle à destination des citoyens. Nous soutenons pleinement cette idée. Nous considérons de plus qu’il faut que ces institutions exigent en retour de leurs partenaires que les contenus ainsi produits soient plus facilement et rapidement diffusables et réutilisables par les citoyens qui les ont financés. C’est le sens des propositions des chapitres licences libres et domaine public.

Le mécénat, qu’il soit individuel ou collectif, doit surtout être réglementé par le droit des contrats pour éviter les fraudes fiscales ou les arnaques au don. Ainsi, les plates-formes de financement participatif doivent être encouragées et non freinées par des incertitudes juridiques sur le statut fiscal des dons ou investissements. Cela peut être fait en leur accordant des statuts particuliers auprès des autorités de régulation de contrôle prudentiel ou de régulation des marchés. Par ailleurs la loi doit prendre en compte ces nouveaux types de financements et ne pas honorer les ventes ou investissements reçus via ces plates-formes doit pouvoir être facilement sanctionné.

L’utilité d’une contribution créative

Instauration d’une contribution créative
Le mécénat collectif peut être organisé à plus grande échelle sous la forme d’un système dit de mécénat global ou de contribution créative, par lequel chaque internaute disposant d’une connexion Internet participe au financement de la création par le biais d’une redevance ajoutée au coût de sa connexion.

Un tel système de financement ne serait pas une licence globale, car la licence globale suppose un mécanisme de compensation comme pour la copie privée. Or les usages d’échange de pair à pair sont légitimes et positifs pour les auteurs comme le public.

Les sommes collectées devraient être gérées de manière transparente et ouverte par des structures différentes des sociétés de répartition existantes. Ces sociétés ne pourront y être associées qu’en respectant les conditions indiquées ci-dessous.

Cette contribution bénéficierait à tous ceux qui font actuellement vivre la culture. Cela inclut les auteurs, mais aussi les techniciens, les éditeurs, les médiateurs culturels ou les producteurs. Elle concernerait toutes les sortes de cultures, y compris non-commerciales et numériques comme les auteurs amateurs de vidéos ou de blogs. La répartition se fera principalement en fonction de la popularité des œuvres échangées. Les données servant à la répartition seraient une compilation de statistiques de fréquentation et de partage via les réseaux sociaux et les réseaux d’échange de pair à pair. Il reviendra aux hommes politiques d’organiser un débat public et une consultation des Français et du tissu associatif de la culture en France pour décider des pourcentages du montant global qui reviendront à chaque type de média.

La contribution créative ne remplacera pas les revenus des activités marchandes ou des associations à but non lucratif, mais elle s’y ajoutera afin de garantir la diversité des productions culturelles en France.

Réformer les sociétés de gestion des droits

La logique des sociétés de gestion relève de l’investissement privé. Un artiste décide individuellement de déléguer la gestion de ses droits à une entité qui lui reverse une partie des droits perçus au prorata de la diffusion et de la réutilisation de ses œuvres. L’utilité de telles entités est certaine car elle simplifie la collecte des droits.

Avec les réformes que nous proposons, leur rôle peut être amené à s’élargir. Il serait logique qu’elles veillent au respect des licences libres amenées à se développer selon le chapitre licences libres, qu’elles perçoivent au nom de leurs sociétaires les revenus issus de la commercialisation des œuvres dérivées des leurs comme proposé au chapitre remix et qu’elles participent au maintien du registre défendu au chapitreregistre. De plus, dans le cas où l’État déciderait de financer la culture via le prélèvement d’une redevance qui s’ajouterait à un abonnement à Internet, les sociétés de gestion pourraient aider à répartir une partie des revenus issus de cette redevance sous réserve du respect de normes de gouvernance plus strictes énoncées ci-dessous.

Les sociétés de gestion sont actuellement entachées par plusieurs soucis majeurs, dont:

  • Les données de répartition ne sont pas publiées par les sociétés de gestion.
  • Elles s’arrogent trop facilement des droits de perception sur des œuvres même quand elles n’en détiennent pas.
  • Elles se basent parfois sur la possibilité de diffusion des œuvres au public pour établir une redevance et non sur la diffusion concrète.
  • Elles ne sont pas démocratiques en raison de votes censitaires ou d’organisations collégiales.
  • Elles monopolisent la gestion des droits des artistes qui y sont inscrits même quand ceux-ci voudraient s’y opposer pour une partie de leurs œuvres ou voudraient accorder des dérogations.

Ces travers dérivent à notre avis d’obligations légales de transparence trop faibles ainsi que d’un manque de concurrence entre les sociétés de gestions qui conduit à des abus de type monopolistique. Chaque société de gestion monopolise l’exploitation des droits patrimoniaux dans un domaine spécifique de la vie culturelle comme le cinéma ou la musique.

Sociétés de gestion
Nous proposons de :

soit

  • ouvrir au marché la redistribution des droits patrimoniaux des auteurs
  • imposer aux sociétés de gestion la transparence des critères de répartition et des statistiques de répartition selon ces critères.
  • sanctionner plus sévèrement les perceptions abusives

soit

  • imposer la règle « un sociétaire pour un vote »
  • laisser aux sociétaires le choix de décider œuvre par œuvre des règles d’inclusion dans le catalogue des sociétés de gestion
  • imposer aux sociétés de gestion la transparence des critères de répartition et des statistiques de répartition selon ces critères.
  • sanctionner plus sévèrement les perceptions abusives

Les sociétés de gestion devraient dans tous les cas continuer à être agréées par l’État car leurs agents doivent être assermentés pour pouvoir constater la matérialité des infractions au droit d’auteur. L’existence d’un registre comme proposé au chapitre registre doit permettre de limiter les perceptions abusives.

Dans le cas de la libéralisation du marché de la perception des droits d’auteurs, un éclatement complet du marché est impossible car une société de gestion ne peut correctement faire respecter les droits de ses sociétaires que lorsqu’elle obtient une taille suffisante. En revanche la scission des sociétés de gestion actuelles en plusieurs sociétés moins portées aux abus et plus à l’écoute de leurs sociétaires et des besoins du public serait le résultat souhaité de la libéralisation.

Index des mesures

  1. Préservation du droit à la paternité
  2. Préservation du droit à la divulgation
  3. Restriction du droit à l’intégrité de l’œuvre
  4. Interdire les mesures de protection technique
  5. Autorisation de contournement des verrous
  6. Inscription du domaine public dans la loi
  7. Protection du domaine public numérisé
  8. Le domaine public n’appartient pas à l’État
  9. Élévation volontaire dans le domaine public
  10. Libération des œuvres subventionnées
  11. Conditions d’accessibilité des données libérées
  12. Valoriser les œuvres transformatives
  13. Étendre le droit de citation
  14. Création d’un registre des œuvres protégées
  15. Dépénalisation du partage sans but lucratif
  16. Réduction de la durée de protection
  17. Instauration d’une contribution créative
  18. Sociétés de gestion

Sources

Les œuvres que j’ai utilisées sont :


  1. Disponible en ligne à http://fichiers.sploing.fr/contexte.pdf au format PDF ou comme page web à http://rda.sploing.fr/partie-2-les-temoignages.